Chronique n°10 :: LA LUMIERE ROUGE

- 16 janvier 2001

• • • Fantaisie Babelouèbienne pour commencer le nouveau millénaire,
les yeux embrumés de joie et de bonheur devant tant de nouveauté innovante.

Le silence se fait dans ma cuisine. On entend le glouglou des tuyaux et le vent qui s'essouffle.

Mon fiston m'avait laissé, avant d'être plié en quatre dans les bagages de ma femme, ses images Povékon sur le Disk de mon ordimatos. Je lui reponds : « OUI, OUI, depêche toi. » Je lui en tirerais quatre sur papier glacé avec mon imprimante couleur, il n'y vera que du feu. Quoi? Ehoh, y en a qui on fait fortune en faisant pire. Regardez Mitendo, l'entreprise qui imprime fiérement sa devise sur ses produits Povékon; « Chopez les tous, ces morveux (tm)!! » ... ah ben tiens, y zont pas eu la place pour écrire la fin.

Je l'entend crier « KEVIN, KYMBERLEY !! Ramenez vous, une urgence. Y a un vieux qui a un malaise ». - Un vieux !! Sale gosse, il a de la chance que je soit en train de faire de l'altérophilie avec mon frigo sinon je lui aurais balancé une rafale de baffes. J'aurais pas du prendre le modéle Zétazunien, celui qui te fabrique des glacocub pour ta Tékilbibine en quantité bourrage de gueule. On court dehors. Des bruits dans l'embrasure de ma fenêtre éclatée. Des paires de jogging m'entourent. Des Adadas 45 fillette qui ripent sur le carrelage. Forte odeur de cuir et de panard. Vade retro Adadas. Mes jambes sont libérées de mon pesant vaisselier. Vindieu, j'ai mal au tibia comme si je faisais une croissance. On libére mes bras du poids de mon Frigogidaire dessiné à la main par Fillipe Stok. C'est plus des biceps que j'ai, c'est des boules de pétanque. Je me redresse avec de l'aide et me retrouve face à Kevin et Kimberley qui me sourient. Deux jeunes grands baraqués gaillards. Un maghrébin du Sud et un africain du Nord. Je me mord la lèvre pour m'éviter de demander qui est Kimberley et je leur en tend cinq en me contentant d'un laconique « Merci, les gars. ». D'une poigne virile mais correcte, ils me les secouent chacun leur tour. « A vot' service, msieur Pétard. »
« Pétrois, mon nom, c'est Pétrois. » précisais je en continuant à me faire broyer les phalanges.
Je tourne la tête vers le gosse. Et toi, comment tu t'appeles ? »
« Url, msieur. »
« Tiens, c'est marrant, comme ... mmh, oui, bon ... Vous voulez mangez des morceaux ? » je demande en me frottant les mains, parce oimbibi y l'avait un ptit creux du fait. Y ont dit ok et on fait la peau tous les quatres à mon Frigogidaire fraichement redréssé. les deux grands, aprés avoir baché avec des sacs poubelles ma fenêtre de cuisine et revissé mon vaisselier, sont repartis vers de nouvelles aventures. Comme quoi un serrage de main et un casse-dalle permettent de communiquer avec les djeunes-à-bonnet. Et pis tant que t'as un manche de pioche scotché sous la table. Url, lui, est resté pour sa récompense.

Je vais dans ma chambre faire chauffer mon ordimatos. J'imprime en quadrichromie les bestioles dégenérés sur le papier adéquat. Et je les débite sous forme de cartes à jouer à coups de cutter à moquettes. Les cartes falsifiées à la main, je me prépare à lui balancer mon meilleur sourire. Le spécial vendeur d'autorouls volées et j'entre dans ma Kub-cuisine. Lumière crue. Tiroirs ouverts. Portes ouvertes. Ambiance glacée. le morveux écarquille ses yeux humides remplis de peur et me lache dans un souffle givré : « Vous voulez connaitre mon secret ?? ... Je vois des gens déconnectés ... depuis ce matin. » Mes lèvres ébauchent un sourire en grincant. Je le décoiffe d'une main. « C'est rien, petit. Ca va passer. Tiens vla tes cartes. » « OUAAAA, Super ! Je les avais pas. Merci msieur Pétrix. » il dit en partant. Comme quoi pour bien escroquer, faut faire rêver.

Je me sépare sans prévenir de mon pyjmoisa imprimé panthére rose et j'entre dans ma douche. Je tourne le bouton metallique d'eau tiède. Plaqué au carrelage blanc du mur que je suis. Par un puissant jet de liquide gris. C'est plus une douche, c'est un cobra qui m'arrose. Je glisse dans un crissement grotesque, à moitié sonné. La tuyauterie éructe. Je me répand sur le sol, dans une position vidéogaguesque. La tuyauterie gargouille. Je reprend mes esprits. J'en avais tant que ça ? Je me reléve. La tuyauterie vibre. Un jet d'eau bouillante dans les dents me réveille complétement. Je m'empresse de rectifier la température et pratique mes ablutions matinales en maugréant. C'est ça, oui. Le brontosaure dans le cartoon de Douzpif. Je savais bien qu'url, ça me disais quelque chose.

La nouvelle vague, la nouvelle cuisine, les nouveaux philosophes, la néoconomie. la nouveauté a fatalement une date de péremption, je me dis en me frottant les fesses au savon de marseille à la senteur anisée. Sacré année qu'on a eu là. Malgré tout la fin c'est toujours la même chose. Noël, ça a senti le sapin pour pas mal de startop.
- Y a ceux qui ont cru au vieillard en rouge.
Le Caïd, face aux autres technopérateurs, a fait une
crise d'Alzheimer foudroyante. Hein, quoi ? Les dossiers techniquologiques hyper importants pour vous raccorder à la boucle locale ? De quoi parlez vous ? On se connait ? Mon dieu, Je crois que je deviens aveugle. Qu'on appele un prêtre, vite, RRrraaah. Enfin, le baratin habituel pour gagner du temps-c'est-de-l'argent. En plus, le Mastar des Télécoms, y voulait, dans la foulée, fourguer une offre qu'on peut pas refuser aux Babelouèbiens. Damned ! Raté ! Ben quoi, on peut essayer, non ?
- Y a ceux qui aiment bien décorer partout.
Vivenzavi, il a exhibé sa grosse fusion à tous les passants sur des affiches de propagande multicolore. - oui à l'émotion, oui à la passion, oui aux stockoption -
- Y a ceux qui aiment bien les cadeaux.
Ropaweb y s'est fait un super bonus en eurokoopek en
refourgant à un rital son provider au logo de révolutionnaire à poil.
- Y a ceux qui sont privés de cadeaux.
Monsieur Sécurité et Monsieur Intelligent, y les ont pas eu
leurs Helvetiks antennes. Mais bon, leur poteau, Monsieur Fédéral, il a mis au point un super gadget pour ouvrir à la vapeur les boites à mails. Et pis les autres gardiens de la Psykozmachine, la PerfidAlbion et la NéoZéland y essayent tout le temps de trouver des astuces pour tout écouter peinard.
- Y a ceux qui prennent des bonnes résolutions.
Not'preministre du Gouv.fr, y va assurer la propagande de tous ce qui se fait en
néotechniquologies publiques dans not'coin de planète. Bon, le fait que les Babelouèbiens soient des voteurs n'a rien à voir, c'est sur.
- Y a ceux qui aiment bien déconner.
Le Gouv.fr, justement, y l'a voulu refourguer le
financement de ses supra-écouteurs aux technopérateurs. Hého, ça va pas non ! On a déja plein de trucs qui nous coûtent un max d'eurokoopek et qui nous rapporte que dalle, qu'ils ont dit.
- Y a ceux qui démontrent leur amour pour les gens.
Kaiser Bazdon, il a même eu plein de
trophées pour son amour immodéré des gens.
- Y a ceux qui démontrent qu'il n'aime pas les gens.
Amazon lecter faut pas
le gonfler avec des revendications sinon tu te retrouve dans la soute, les fers aux pieds, à te palucher des cartofiches pour Bazdon.
- Et Y a ceux qui aiment pas les contes de noël.
Neomarket Crugger, il a halluciné. Faut qu'il arrête les shoots à l'oxygène qu'il s'est dit. Il était certain de leur avoir défoncé le crâne à coups de caterpilon à
ces startop. Même que c'est dans son arrière-cuisine sombre, sous le poster du docteur Pétiot, qu'il leur a débité la carcasse avec sa Nasdack&Deker. Equarissage pour tous, sacrée bonne année que c'était pour lui. Ben là, vla que nao c'est l'année des morts-vivants. Enfin bon, le début d'année, c'est toujours la période des soldes.

Habillé de frais. Rasé d'à peu près avec mes rasoirs Tic. Je me met en tête de sortir de chez moi pour aller voir les gens du dehors. Pour vérifier l'ampleur des dégâts de la nuit. Sur le terrain, comme y disent les politiks. Tiens, y s'entrainent dur en ce moment les politiks. Sur les marchés, les vrais, ceux où on vend des fruits et des légumes. Un vrai parcours commando. Une tite vieille. Tract!, une brioche de fin d'année et des super-loto à la M.J.C. du coin. Un djeune, tract!, une salle des sports et des cybertroquets. Merdafeuk, c'est un ouinneur, heu, tract! aides à l'embauche et avantages fiscaux. Ah, y l'est fort, le gamin, il a failli me biaisé. Mais il est pas encorné, comme disait Miguellito, celui qui me biaisera. « Votez pour Oimbibi. »

Dans le fond de mon fut, je retrouve un vieux tract ronéotypé de la
S.O.U.K, La Secte Ouèbienne Unifiée contre le Kapital. « Connectépipoles, vous êtes bernés par les sites, venez nous rejoindre ! » s'étalait en gras sur le bout de papier jauni. Ah, les mecs de la S.O.U.K. y doivent communiquer en sémaphore ou par signe avec des panneaux de chantier en ce moment. J'enfile mon blouz et je cueille mon flingomatik accroché au porte-blouz. C'est le bigChief qui voulait que les specteurs soient armés. « La Néoconomie, c'est la jungle ! » qui nous avaient dit. Pourtant je suis pas vraiment genre à buter le premier venu. Quoique le deuxième. Remarquez, je viens de lire dans mon canard qu'on avait repéré de nouvelles meutes de Trideubeulious. Ces saletés de bestiaux baveux. Alors je fourre mon pétard dans la poche étudiée pour et je prend aussi ma magnétocard. Y arrêtent pas de dire à la tévé, qu'il faut toujours sortir à découvert.

Je marche pendant un bon moment entre les gigantesques façades gris-béton. Vindieu, y a du populo dehors dés qu'y a plus d'écran à regarder. Puis les ruelles se désertifient. Y a dl'uranium appauvri dans le coin ou quoi ? J'entends comme une étrange litanie au bout d'un moment.
« FPO ... IPO ... EPO ... ESB ... USB »
Je m'oriente à l'oreille. Un cul-de-sac. J'arrive à un mur de brique avec une éventrure au bas. Je me penche et m'hasarde dans le trou noir. Je fais quelques pas dans l'obscurité le flingomatik à la pogne. Mes pieds s'enfoncent dans de la poussière grise humide. Schlop. Schlop. J'approche d'une ouverture où filtre une lumière blafarde. Une silhouette se détache du fond dans la pénombre. Un garde, y semblerait. Un type rustique qu'on dirait taillé dans le granit. Au piercing proéminent, toutefois. C'est au moment où je sens son haleine que je comprend le rôle du lascar. Lorqu'il me repére, il se dégoupille la narine gauche. Mine antiperso qu'il était. Et il m'explose littéralement à la face ce gros dégoutant.

  Sommaire
des chroniques


Le faux rhum
de Max Pétrois


Le livre en métal précieux

Mailez moi de ce
qui vous regarde


> Imprimer © 2000/2001 - Max Pétrois I Qui suis je ? I Chronique suivante Commentaire ?