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Là, les poteaux, ma
situation est dans le rouge.
Le biomorphoïde spongiforme veut me sucer la tête sans
autre forme de procès. Je lui coudegenoute innocemment
mais fermement l'entre cuissots, histoire de feinter.
Stupido. Je me souviens avoir lu dans un grimoire sur
micro-cd à la médiathèque de mon quartier que le
trideubeuliou avait sa cervelle à cet endroit. Je lui ai
flanqué tout au plus une migraine carabinée.
Je profite malgré tout d'un moment de flou chez le
bestial pour plonger sur mon flingomatik. Je me retourne
dans la poussière. Position femme qui accouche. Mon bras
valide lui vide un chargeur dans la tronche. Vindieu, moi
qui déteste les jeux vidéo. La bestiole décapitée s'écroule.
Ouf. Je m'étends pour souffler.
Une goutte de bave me frappe le front. Je me souviens sur
le coup que ces enpafés se baladent en binome. Une
gueule béante me tombe dessus en grognant. Par réflexe,
je lui enfonce le canon de mon arme dans la gorge. Clic.
Clic gauche. Clic droit. Que nadalle. Plus de bastos. La
bête se dégage la glotte et me file un coup de paluche
dans le bras. J'entends mon soufflant cogner contre un
mur. La bébête immonde va me planter ses pattes
griffues dans la poitrine et m'ouvrir la cage thoracique
comme une boite de conserve. Un sifflement et je me
prends la tête de l'attraction foraine dans le bide.
Ahuri, je me remets lentement perpendiculaire au sol pour
mieux apprécier la situation.
Je me retrouve face à un gaillard encapuchonné. Une
machette comak à la main. Derrière des cheveux filasses
et gras, s'élargit son sourire nicotinisé. Le type, d'une
main, abaisse sa capuche. XWZ6-01. C'est ce qui me vient
en premier à l'esprit. Un numéro de fiche signalétique.
Samuel. Samuel Vorass.
- Saletés d'engeance, pas vrai ? dit le dresseur de
scriptokookies en contemplant les cadavres de
trideubeulious en train de dégager déjà une forte
odeur de moisi. Du bol que je travaillais à coté.
- Du bol, ouais. Ton bureau est à coté ? je demande.
- Ohla ohla. Jvous vois arriver avec vos rangers. De
toute façon j'ai reformaté mon hardisk. Et pis vous me
devez bien kekchose, non ? trois mois d'avance avant de
reprendre votre traquage dit le coupe-coupe-hacker.
- Ca marche.
J'articule en me libérant la vessie contre un mur. Trop
d'émotion.
- Et puis je prends le mec en bleu, là. dit le gars
Vorass en pointant le P.D.G. de « Pensée &
Rentabilité ». Je crois bien que mon épicier arabe est
fermé à cette heure.
Et Samuel balance le bizenessman en travers de son épaule
et me fait un signe de la main en partant se le farcir au
petits oignons.
Ce qui m'amuse c'est que connaissant le lascar, il va sûrement
faire bouillir les os pour les revendre sous forme d'amulette
aux blakomédiums du coin. Une vibration me fait
sursauter. Quelque chose de dur dans la poche de mon fut.
Pourtant c'est pas le matin.
Je plonge ma main et décroche mon palmdriver en état de
marche. « PETROIS, FEIGNASSE, LES AFFAIRES REPRENNENT.
AU RAPPORT, DEMAIN 6H ! ! ! ». Mon bigchief adulé. A la
question « transmission de l'haleine et des postillons ?
», j'appuie sur non. Je finis d'enlever mes bandages, je
ramasse mon flingomatik et je me dirige vers la lumière
du jour.
Une petite brise m'accueille à la sortie du mur.
Quelques badauds me croisent en me dévisageant. Il fait
encore clair mais les réverbères sont allumés. Toutes
ces clowneries m'ont fait sauter un repas et mon estomac
me le rappelle. J'accélère le pas.
Dans la rue, des vitrines de magasins sont brisées. Des
petits commerçants, thoraxs défoncés, gisent sur leur
comptoir. Saleté de passage à l'eurokoopek. C'est ce
qui a fait sortir les affreux charognards. Je m'arrête
au bar « L'Absinthe guillerette » où j'ai mes
habitudes. Je raconte ma virée à mon poteau, Raoul
Mulot, le tavernier. Les deux tites vieilles, assises au
fond du troquet -toujours les mêmes- se refont une beauté
à coup de Vodkapicol.
En bon commerçant, le gars Raoul, tout en essuyant ses
chopes, fait semblant de m'écouter. Je déblatére, je
bois une tékilbibine. Puis deux. Puis plusieurs
finalement. C'est pas tous les jours que mon frigogidaire
veut m'assassiner. Qu'on me pète à la gueule et qu'une
nouvelle race de mutant batardé prend ma cervelle pour
un cocktail exotique. Au bout d'un temps, je salue la
compagnie et sinue jusqu'à mon logis.
J'arrive chez moi. En entrant, je bute contre des boites
de cartons entassées près de la porte. Ah, merdafeuk,
les tombés de camions d'ibouk, c'est vrai. Qu'est ce que
je vais en faire ? Même les receleurs de mon quartier n'en
veulent pas. Je me déleste de mon blouz et de mon
soufflant. Je m'oriente vers ma Kub-cuisine et fait
fusionner trois plats supergelés à coups de maxionde.
Ting !. Je me goinfre le résultat sous le néon malade
de la pièce. Je vide les restes de bouffe dans mon
aspirpoubelle et ma vaisselle dans ma lavomachine. Ou le
contraire. En quelques enjambées, je me téléporte
aussi sec dans mon salon, me vautre comme une bouse dans
mon canap. Pouf !. J'allume ma tévéanimé et je zape
sur une émission qui rend fou. Histoire de me vider le
crâne aussi sûrement qu'aurait pu le faire le
trideubeuliou. Au bout d'un temps, suffisamment lobotomisé
et désinformé, je vais m'affaler dans mon sakaviande.
« LA CATAGONIE DE LA NEOTECHNIQUOLOGIE » s'étale en
gras à la une du journal que me tient le bigboss et dit,
en tapotant l'article de l'index :
- Là le gars Neomarket, il se fait aider, c'est sûr.
Encore "avant", les startops se faisaient
liquider une à une, en père peinard. On parlait de sélection
naturelle. Mais là c'est des charniers entiers qu'on découvre
tous les jours. Les salles 404 des nécroseries ne désemplissent
plus. Les cellules du psychopénitencier regorgent de
riskinvestisseurs ruinés. Les tits porteurs se flinguent
à tour de bras. Des chomdu comme si il en pleuvait. La néoconomie
qui était l'aphrodisiaque de la bourse se transforme en
antidépresseur. Même Le Gouv.com est salement touché.
La C.O.M. aussi, du fait. Rendez vous compte, le Caïd,
lui même, perd des montagnes de thunes. Lui qu'on
croyait forgé dans le marbre.
- Heu, sauf vot'respect, Bigchief, on ne peut pas forger
du mar...
- Oui, aahh. C'est bien le moment de plaisanter. MOI, j'ai
perdu un pognon monstrueux en achetant du papier à en-tête
de jeu vidéo. Même le jeu vidéo s'effondre. Les jeux
vidéo ça vaut que nadalle. Les salopards, y respectent
plus rien...
Se lamente le chef en tamponnant son pif contre le mien.
Misère, y a des moments je me demande vraiment pourquoi
je continue à faire ce boulot. « Pour votre salaire et
votre Satrane de fonction », je réponds. Quand même,
tout ce bazar au moment où le Gouv.fr allait nous
expliquer ce qui comptait faire pour Babelouèbe. C'est
vraiment pas de chance. J'ironise.
- Faut arrêter l'hémorragie, Pétrois ! Le Gouv.fr,
Mondotour ont besoin de vous.
Annonce mon patron, la voix grave en me mettant sa main
sur l'épaule. Redressant fièrement le menton en
direction du cadre du grand homme bancal, accroché derrière
son bureau.
Tu parles d'une motivation. |
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des chroniques
Le faux rhum
de Max Pétrois
Le livre en métal
précieux
Mailez moi de ce
qui vous regarde
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